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Nuages noirs sur les retraites

Notre prévoyance vieillesse est à la croisée des chemins. Vendredi, l’Union syndicale suisse lançait l’alerte. En plus de l’augmentation de l’âge de la retraite des femmes à 65 ans, la droite s’en prend au compromis ficelé par les partenaires sociaux pour réformer le 2e pilier. Un compromis qui, pour compenser la diminution des rentes découlant de la baisse du taux de conversion, propose d’introduire des suppléments de pension dégressifs.

Une lame de fond s’abat sur nos retraites. Cette lame de fond, c’est cette volonté de faire payer toujours plus les moins bien lotis, pendant que les plus riches s’arrogent privilèges sur privilèges. On l’a d’ailleurs constaté durant la première année de Covid. Des centaines de milliers de travailleuses et de travailleurs ont dû vivre avec des salaires amputés de 20% ou plus. Et les nantis ont accru leur fortune malgré, ou grâce à, la pandémie, creusant toujours plus les inégalités dans notre pays.

Cette lame de fond est nourrie par les assurances et les banques, qui ont toujours voulu garder la main sur nos retraites. En démantelant l’AVS, avec le soutien de la droite au Parlement et celui du Conseil fédéral, elles s’offrent des garanties de revenus supplémentaires.

Nos caisses de pension, avec leur système de capitalisation, leur sont profitables. Le 2e pilier repose sur un coussin de réserves de 1000 milliards de francs. Une somme gigantesque qui a triplé depuis qu’il a été rendu obligatoire, en 1985. Cette fortune représente aujourd’hui presque une fois et demie le Produit intérieur brut de la Suisse, soit la richesse totale produite en une année. En comparaison, l’AVS verse, sur une même période, quelque 45 milliards de francs de rentes, et sa fortune se monte à 38 milliards.  

Conçu pour un travailleur à 100% avec un salaire correct, qui ne divorce pas, n’a pas de pépin de santé durant sa vie active et ne perd pas sa place de travail, le système du 2e pilier a créé de profondes inégalités. Entre retraités et retraitées, entre hauts et petits revenus. Alors que l’AVS, fondée sur une redistribution solidaire des cotisations, est un exemple d’égalité en matière de rentes.

Face aux attaques qui se concoctent dans les salons feutrés du Parlement, avec le soutien des assureurs et des banquiers, force est de constater que le système des deux piliers – le 3e étant déjà largement inabordable pour les salariés – est dans une impasse. Ces 1000 milliards de francs qui aujourd’hui alimentent la spéculation et des investissements pas toujours éthiques ne permettraient-ils pas de réinjecter de la solidarité dans les retraites, pour que toutes et tous puissent vivre dignement après des années de travail? Bien sûr, il n’est pas question de voler l’argent des assurés, d’autres s’en chargent déjà. Mais de réfléchir à une refonte totale de notre prévoyance vieillesse, afin d’ouvrir un horizon autre que celui du moindre mal face à une droite arrogante et vindicative.

Si, pour l’heure, les syndicats n’ont pas mis cette question à l’ordre du jour, elle mérite d’être posée. Pour que l’on cesse de nourrir un système économique qui donne d’une main ce qu’il reprend à double ou à triple de l’autre. Et pour que les besoins de l’être humain soient au cœur de l’économie. «Utopie!», nous rétorquera-t-on. Non, c’est juste de l’avenir de nos retraites et de nos vieux jours dont il s’agit. Mais d’abord, il y a urgence. Il faut contrer les attaques en cours, et manifester massivement devant le Palais fédéral à Berne le 18 septembre pour dire non au démantèlement de nos rentes et non à AVS 21!