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Une responsabilité sociale 

Les initiateurs «Pour des multinationales responsables» s’inquiètent de la dignité des humains sur leurs lieux de travail. Il n’est pas normal au XXIesiècle que des enfants et des travailleurs soient exploités dans des conditions épouvantables en l’absence de protection physique, de santé et de sécurité. Sans compter l’extrême pauvreté. Le constat est avéré autant dans les mines, les plantations que sur les lieux de fabrication (textile) et de production électronique (Indes), cela uniquement pour des intérêts égoïstes et de rentabilité. Et bien souvent dans des pays démunis, mais riches en matières premières: or (Burkina Faso), cuivre, cobalt et platine (Congo). Les produits recherchés dépendent du domaine dans lequel est active la multinationale dont le siège est en Suisse (commerce, raffinerie d’or, par exemple).

C’est pourquoi je me suis engagé à soutenir l’initiative. En tenant compte de l’aspect humain, j’ai pu constater dans mon entreprise que les résultats matériels étaient meilleurs. Un comité économique de soutien d’une centaine de chefs d’entreprise vient d’être lancé. Il est temps que les multinationales concernées par les abus prennent au sérieux leur responsabilité sociale et environnementale. Elles auraient moins à pâtir des mauvaises relations d’affaires et de procès, seraient davantage reconnues par leur intégrité et recevraient la confiance attendue de leur clientèle et du public. Ce qu’elles perdraient en pénalité, elles le retrouveraient en gérance financière propre et moins coûteuse.

Contrairement à ce que pensent certains grands leaders, il ne s’agit pas dans le cas de cette initiative de lutter contre les abus de négoce financier ni d’une lutte contre la corruption matérielle sous ses diverses formes. Il s’agit d’un autre débat.

Souhaité par l’initiative, le devoir de diligence raisonnable (identification des risques) en matière des droits humains est le meilleur instrument pour les entreprises, afin d’éviter une implication dans la violation. Si l’homme faible, le PDG ou CEO, ne tient pas à prendre ses engagements lui-même, il faut édicter des règles pour obtenir un certain ordre pour tous. Pourquoi la réputation de la place économique de notre pays devrait-elle continuer d’être éclaboussée par des scandales impliquant des entreprises suisses? Selon l’initiative une multinationale pourrait être contrainte de payer réparation à une victime, s’il est prouvé qu’elle n’a pas pris toutes les mesures pour remédier au dommage. 

La voix du peuple sera assurément déterminante lors de la votation, probablement début 2020. En cas de oui dans l’urne, la Suisse ne serait pas seule dans cet engagement car de nombreux gouvernements et organes de la société civile l’ont compris: législation contre l’esclavage (de la Californie à la Grande-Bretagne), loi sur le «devoir de vigilance» en France. Au-delà de la cohérence éthique à laquelle, au fond, la plupart des acteurs de l’économie aspirent, un tel investissement aurait rapidement des retombées positives. Enfin la Suisse pourrait améliorer sa réputation au plan international et retrouver la crédibilité perdue ces dernières années. Elle prouverait la mise en accord des discours par des actes courageux. Il y a urgence de remettre (ou de mettre) l’économie au service de l’Homme.

Jacky Brandt, patron à la retraite, Bulle