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Taxer les ultra-riches!

Elon Musk, l’un des hommes les plus riches de la Terre, a été taxé, entre 2014 et 2018, à un taux d’imposition réel de 3,27%; Aber Christine, une vendeuse de farine en Ouganda, a dû pour sa part verser au fisc 40% de ses bénéfices. Ces deux exemples figurent dans le dernier rapport sur les inégalités mondiales d’Oxfam. On y apprend notamment que le fossé entre les moins bien lotis et les poignées de gagnants d’un système qui marche sur la tête s’est encore creusé. Que le nombre de personnes s’endormant le ventre creux a augmenté alors que les fortunes stratosphériques des milliardaires ont continué à croître. Que, pour la première fois en 25 ans, la pauvreté progresse. Selon l’ONG britannique, les 1% les plus fortunés de la planète possèdent désormais près de la moitié des richesses mondiales. Ils ont encore réussi à gonfler leur magot au cours de ces deux dernières années tirant parti de la pandémie et raflant 28000 milliards de dollars supplémentaires, soit près de deux fois plus que les 99% de l’humanité restante. L’enquête pointe encore les bénéfices faramineux des entreprises dans les secteurs de l’alimentation et de l’énergie avec des profits qui ont plus que doublé en 2022 et le versement de 257 milliards de dollars à leurs actionnaires. Parallèlement, près de la moitié de la population du globe vit avec moins de 5,5 dollars par jour. Et plonge dans une extrême précarité quand un imprévu comme un épisode climatique contraire, une mauvaise récolte ou des soins médicaux vient rompre un équilibre financier plus qu’aléatoire... Quelques exemples chiffrés parmi bien d’autres qui, une fois de plus, démontent le mythe de la théorie du ruissellement. Et projettent une lumière crue sur la perversité d’un modèle économique et social permettant à la cupidité et à l’égoïsme sans limites de quelques-uns de faire main basse sur le fruit du travail du plus grand nombre. Sans oublier, évidemment, le poids de ces ultra-riches dans les sphères des pouvoirs et les menaces que confère leur statut de privilégiés aux moyens illimités sur la démocratie...

Pour mettre un terme à cette concentration indécente des richesses et lutter durablement contre la pauvreté, Oxfam préconise une «taxation honnête» des nantis à des taux progressifs définis à l’échelle des fortunes. Une proposition qui devrait couler de source tant elle relève du bon sens. Cette solution permettrait, comme le souligne l’ONG, d’éradiquer la faim sur la planète, d’aider les pays subissant de plein fouet les conséquences d’une météo qui s’affole ou encore de financer des politiques humanitaires, de santé ou éducatives. L’enquête d’Oxfam a été publiée le 23 janvier, jour d’ouverture du Forum économique mondial de Davos qui a fermé ses portes vendredi dernier. Avec l’idée d’influer sur cette traditionnelle grand-messe des élites politiques, économiques, académiques et des représentants d’ONG réunis pour réfléchir à la manière de «coopérer dans un monde fractionné». Un truisme, sur fond de guerre en Ukraine, de dérèglement climatique, d’inflation, de récession et de crises sociales annoncées et, bien sûr, d’inégalités croissantes... Une dernière thématique souvent soulevée, jamais vraiment empoignée. Peu probable que les décideurs – qui ont ausculté le monde dans les salons feutrés de la station grisonne – contribueront à des changements de paradigme en profondeur, entre absence de volonté politique et crainte d’un départ des ultra-riches, attachement à un libéralisme débridé, prérogatives... Peu de chance d’assister à une remise en question d’un capitalisme sauvage plus enclin à étrangler les citoyens ordinaires qu’à imposer équitablement les profiteurs. Le rideau tiré, une partie des puissants est repartie à bord de coûteux et hyperpolluants jets privés, incarnant à eux seuls ce monde plus que jamais fractionné sur lequel ils étaient supposés se pencher...